A l'instar de nombreux artistes COLLANDRE s'efforce de se libérer de son savoir-dessiner. Non qu'elle ait rejeté le dessin, elle continue même à en couvrir de multiples carnets.Mais parce qu'elle souhaite "oublier" un certain réalisme . En somme, elle éprouve le besoin de quitter la tranquille autorité des formes préalablement installées pour parvenir à une démarche beaucoup moins formelle.

 Ainsi, attentive à ne pas retomber dans l'académisme qu'elle s'est efforcée de fuir, Françoise COLLANDRE s'exprime en une figuration très libre, jamais réaliste ... Là encore, elle a su se dégager des recherches multiformes de ses prédécesseurs concernés par les mêmes quêtes picturales ; et trouver sa ligne personnelle. Grâce à laquelle elle EST enfin elle-même. Et, à l'évidence heureuse, dans cette formulation sans entraves où s'exprime pleinement son talent : peignant en demi-teintes, elle obtient des approches de couleurs de la plus douce harmonie, des jeux de lumières aux subtiles compositions. Lesquels rejoignent et conditionnent la structure du tableau - la composition est, en effet, la préoccupation principale de cette artiste.

 Mais là où elle excelle, c'est dans les scènes d’atelier où dans un savant désordre, elle installe à l'avant-plan du tableau un nu au corps démesurément filiforme et aux longues mains fuselées. Personnages hiératiques comme des odalisques, sans connotation sociale ou temporelle, personnages de tous les temps ... voilés de papiers arachnéens collés sur la peinture, tellement retravaillés qu'ils ont l'air d'être peints eux-mêmes, et qu'ils génèrent une sorte d'aura mystérieuse, romantique, un sentiment de rêverie énigmatique. Comme si l'artiste, en posant sur la toile ses créatures éthérées dans un cadre évanescent, réfléchissait avec philosophie, jouait de ses questionnements, explorait son monde intime à travers son oeuvre si personnalisée, à la fois douce et assurée, ÉVIDENTE comme toutes les créations originales.   Jeanine Rivais